Suite à notre article sur le lancement de VeraOne, le stablecoin français garanti par de l’or physique, voici une interview de son PDG Jean-François Faure, qui répond à nos questions.
Il aborde des points intéressants sur cette rencontre de l’or et de la blockchain sous forme de cryptomonnaie et de l’intérêt de posséder ou d’utiliser un stablecoin garanti par de l’or physique par rapport à un stablecoin comme le Tether USDT.
Il nous donne son feedback sur les difficultés rencontrées dans le lancement d’une cryptomonnaie en France et ses conseils pour un entrepreneur qui voudrait se lancer dans le secteur crypto blockchain.
Son point de vue aussi sur un autre stablecoin qui arrive, le Libra de Facebook, et les prochaines étapes concernant le stablecoin VeraOne qui vient d’être lancé.
Pouvez-vous vous présenter et peut-être nous donner quelques chiffres sur votre activité liée au commerce de l’or ?
Alors notre métier depuis 10 ans consiste à stocker des métaux précieux sous forme physique, les garder pour le compte de nos clients et leur permettre ensuite par tous les moyens que nous mettons à leur disposition de pouvoir les revendre le plus vite possible et cela dans les meilleures conditions.
Cela passe essentiellement par de la digitalisation des transactions.
Tout cela le plus possible en dehors du système bancaire pour éviter les problèmes de contrepartie.
Si aujourd’hui nous étions un pays, par rapport à la quantité d’or que nous conservons pour le compte de nos utilisateurs nous serions dans les 90 premiers au monde.
Notre groupe réalise plus de 70 millions d’euros de CA par an.
Pour répondre à cet enjeu, nous avons aujourd’hui 3 services forts qui sont aussi des marques qui sont à présent reconnues dans notre milieu:
– Aucoffre.com:
La plateforme d’achat et vente de pièces d’or avec garde en coffre de haute sécurité, hors système bancaire.
Depuis 2009 elle est dédiée aux investisseurs particuliers qui souhaitent bâtir une épargne de précaution avec l’or physique essentiellement sous forme de pièces.
Avant d’être vendues à nos utilisateurs, les membres d’Aucoffre.com, ces pièces sont issues du marché professionnel, toute numérotées individuellement et prises chacune en photo.
Une pièce, une fiche. Cela fait des centaines de milliers de fiches.
Elle sont conservées dans nos chambres fortes aux Ports Francs de Genève.
Par le biais de la plateforme, nos utilisateurs ont à tout instant accès à leur portefeuille, ils peuvent voir leurs produits et peuvent décider à tout moment de les revendre.
Ce sont eux qui fixent le prix en se confrontant aux règles de l’offre et de la demande.
On prend sur les transactions une commission et il y a des frais de garde.
Le modèle est très simple.
S’ils le souhaitent, ils peuvent prendre possessions physiquement de leur pièces.
Mais finalement, très peu de nos 30000 utilisateurs le font car ils savent qu’ensuite ils leur faudrait trouver un moyen de conserver cet or.
Et là, nous savons qu’en avoir à la maison, c’est dangereux à cause du vol et des assureurs qui assurent mal l’or détenu à domicile.
Nos clients ont bien compris qu’avoir de l’or à la banque, c’est tout aussi dangereux.
En effet, s’ils achètent de l’or pour se protéger des effets des crises et c’est justement à ces moments que malheureusement les banques ferment leur porte.
Ce n’est pas une fiction, nous l’avons vu des dizaines de fois dans le monde, y compris en Europe depuis la crise.
Aucoffre.com est aujourd’hui leader de son marché en France.
– Ensuite il y a VeraValor, notre activité de frappe de pièces lancée en 2011.
Nous avons inventé à cette date ce qui pour nous doit être l’idéal en matière d’or ou d’argent d’investissement.
Des pièces avec des métaux issus de la meilleure origine, qu’elles puissent êtres reconnues dans le monde entier, fiscalement optimisées et embarquant des innovations permettant d’avoir une sécurité maximale.
Enfin, que ce soit aussi des pièces belles à voir et collectionner car nous apportons le plus grand soin à leur production (soit par des partenaires renommés ou bien par nous même).
Depuis 2011, nous avons produit plus de 1 million de pièce de différentes natures : en or, en argent, du 1 gramme d’or jusqu’à la une once.
Nous avons trouvé des accords avec certains pays partenaires qui font, qu’aujourd’hui, nous produisons de plus en plus de pièces avec un cours légal.
Leur donnant ainsi une reconnaissance internationale encore plus forte.
Je peux déjà annoncer à nos utilisateurs que 2020 va voir un renouvellement complet de notre gamme de pièces d’or et que les nouveautés frappées seront exclusivement à cours légal.
Nous sommes en volume et en valeur, le deuxième acteur en France à frapper des monnaies en or ou en argent.
– Enfin il y a VeraCash.
VeraCash est une monnaie d’échange basée sur les métaux précieux.
Elle a vocation à sécuriser en cas de crise, de rendre liquide son épargne à tout instant, et le reste du temps de permettre l’envoi de valeurs partout dans le monde, de manière instantanée et sans frais.
Elle vise les particuliers, les groupes et les entreprises de n’importe quelle taille.
C’est un système qui digitalise de manière ultime l’usage des métaux précieux sous forme physique.
Car vous avez toujours bien de l’or 100% physique, sous forme de pièces ou bien de lingots stockées aux Ports Francs, mais vous utilisez cet or de manière transparente et dématérialisée au moyen des outils numériques ou des instruments de paiement que nous proposons.
Avec VeraCash, vous pouvez par exemple payer n’importe où dans le monde la note d’un restaurant au moyen de la carte de paiement que nous proposons à nos utilisateurs.
Au moyen de l’application de type wallet, il est possible de consulter l’état de son compte ou bien d’envoyer de la valeur à une autre personne.
En clair, VeraCash vous permet de faire au moyen d’un compte alimenté en or et argent physique les mêmes choses que certains font aujourd’hui avec les néobanques.
La seule différence est que votre monnaie, c’est l’or ou l’argent métal au lieu des Euros ou des dollars.
VeraCash est leader en Europe autour de son service et nous avons reçu plusieurs prix pour récompenser l’innovation que cela représente.
Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans la cryptomonnaie et la technologie blockchain ?
Aujourd’hui les enjeux ne sont plus seulement de voir l’or comme un actif de thésaurisation mais clairement de le faire revenir dans la course d’un usage monétaire.
Pourquoi ? Personne n’a loupé l’émergence des cryptomonnaies.
C’est devenu un tel enjeu que lorsque vous avez par exemple un acteur comme Facebook qui annonce le lancement prochain de sa crypto monnaie à l’attention de ses 2,4 milliards d’utilisateurs, vous avez de suite une levée de bouclier des banques centrales elles mêmes comme si elles subissaient une attaque pouvant être mortelle.
Alors aujourd’hui, on considère, comme des millions de personnes dans le monde, que le paysage monétaire sera complètement transformé dans les 10 à 15 prochaines années.
Et on pense que l’or a une place majeure à y prendre.
Pire, s’il ne prend pas cette place maintenant, il sera éclipsé et cela mettra fin à 5000 années de présence continue comme monnaie directe ou de réserve.
Régulièrement nous réalisons un sondage national et l’on demande à 1000 français s’ils pensent que l’or pourrait être une meilleure monnaie que l’Euro.
Presque 40% répondent oui.
Cela prouve que les gens ont un problème avec leur monnaie.
On note aussi qu’à ce même sondage, 20% pensent que les cryptos pourraient êtres de meilleures monnaies que l’Euro.
Nous, on pense que le futur monétaire passera très probablement par l’émergence de cryptoactifs pensés dans ce but.
Pourquoi des cryptoactifs ?
Car les technologies sur lesquelles ils s’appuient, telle que la blockchain, sont aujourd’hui les moyens les plus efficaces pour ne plus concentrer les risques sur un seul acteur, sécuriser les transactions, et éviter des manipulation par des tiers.
Une course est déjà lancée et il ne faut pas traîner, les places sont à prendre maintenant, pas dans 6 mois.
On a su déployer une expertise depuis plus de 10 ans sur le secteur des métaux précieux physiques, ce service est dans la droite ligne de ce que nous savons faire.
La culture blockchain, nous l’avons aussi puisque nous avions été les premiers de notre secteur en 2016 à mettre en place sur une blockchain (hyperledger) notre registre de police.
L’idée était alors de capitaliser sur nos connaissances pour répondre à ce nouvel enjeu.
Quelles ont été les difficultés techniques et juridiques que vous avez rencontrées dans la création de ce stablecoin VeraOne garanti par de l’or physique ?
L’environnement lié aux techno blockchain et crypto est encore jeune et en mutation quotidienne.
Dans un tel contexte, les enjeux de confiance, de sécurité et de meilleurs choix techniques sont cruciaux.
Car nous devons à la fois bâtir un modèle pérenne mais devoir le faire évoluer dans un univers qui, dans 10 ans, ne ressemblera probablement plus du tout à celui d’aujourd’hui.
Donc, l’enjeu majeur a été au final d’être avant tout nous même (gardiens de matières précieuses), de bâtir une offre durable, tout en ayant l’agilité technique pour que le socle technique mouvant sur lequel nous nous appuyons ne soit ni un frein à notre développement ou bien ne représente un danger sur le plan de la sécurité.
Sur le plan juridique, on considère qu’en France, la loi PACTE et notamment le statut de PSAN vont tuer l’innovation autour de l’univers des cryptoactifs.
Aussi, dès le début, nous avons décidé de lancer notre activité depuis notre filiale Anglaise Lingold et de nous adresser qu’à une clientèle anglophone.
On considère que notre métier, qu’il soit lié à une blockchain ou pas, est avant de tout de vendre, garder et racheter de l’or à nos clients.
Un token n’est qu’un support.
Quel intérêt d’acheter ou de posséder un stablecoin garanti par de l’or physique par rapport aux autres stablecoins du marché comme le Tether USDT ?
D’abord, il faut faire un rappel concernant l’or: il est reconnu comme une monnaie ou une para monnaie stable depuis 5000 ans.
Il est dans le top 5 des actifs le plus liquides au monde (après les bons du trésor américain et quelques paires de devises).
Les Etats en possèdent mais aussi les grandes banques, certaines entreprises et aussi des particuliers, partout dans le monde.
Dans chaque pays, il existe au moins une loi qui en légalise l’achat et la vente.
Il est à la fois reconnu et structuré tant par l’industrie de la finance la plus évoluée que des utilisateurs tribaux en des lieux où seul le troc existe.
La moitié de l’or utilisé l’est pour la seule industrie du bijou.
Alors oui, l’or est volatile, bien évidemment, de même que le Dollar ou l’Euro.
Ce qui compte c’est la proportion dans laquelle il est volatile.
Et pour ça j’ai un graphe à montrer.
La courbe du haut représente la volatilité de la parité Bitcoin/dollar et celle du bas la parité or/dollar.
Il s’agit donc d’une volatilité qui est assez proche d’une monnaie mature style livre sterling.
Pour en revenir à la volatilité au sens large, même si une majorité des utilisateurs/détenteurs de cryptomonnaies recherchent justement cette volatilité dans une logique d’efficacité spéculative, cette même volatilité est aujourd’hui un frein pour que les cryptos puissent êtres reconnues et utilisées comme des monnaies.
Quel site de commerce électronique accepterait en paiement du Bitcoin ou de l’Ethereum autrement que pour une opération marketing, alors que ce même site va payer ses fournisseurs dans une devise classique ?
Il est évident que ce même site doit soit accepter de prendre un risque sur sa marge (justifié par une politique marketing cryptophile) ou bien il doit trouver immédiatement une couverture dans une monnaie fiat.
Cependant, ce même site a certainement des clients et des fournisseurs dans le monde entier utilisant des devises différentes.
Comment alors faire pour choisir la bonne devise de couverture ? Prendre le dollar ?
Aujourd’hui, changer des cryptomonnaies contre du dollar sur un compte en banque est compliqué et/ou cher.
Bien sûr, on vient de voir qu’il existe des stablecoins adossés au dollar qui permettent de réaliser cette opération.
Il s’avère cependant que ces outils peuvent être très dangereux car le collatéral n’est pas garanti à 100% (Tether = 74% d’USD réels derrière. Il se passe quoi si tout le monde revend ses tokens Tether ?).
Ensuite, il faut se poser une question de base : le dollar est-il finalement le choix idéal ?
Si les fournisseurs sont Suédois, Polonais, Anglais, Japonais, on rajoute des devises intermédiaires et donc des frais ou de la complexité.
Dans tous les cas on prend des risques.
Le dollar n’est ni universel, ni stable, et c’est la devise d’un pays qui en fixe unilatéralement et mondialement les règles d’usage.
Et de manière fondamentale, on doit s’interroger pour savoir s’il est sain d’adosser à un stablecoin un actif tel que le dollar, une monnaie qui ne partage en rien les valeurs qui ont poussé à la naissance des cryptomonnaies majeures actuelles ?
Une monnaie qui perdu plus de 90% de sa valeur en 50 ans devrait être la norme des sous-jacents pour un stablecoin ?
Paradoxal ! Petit rappel 1 once d’or valait 35 dollar en 1971, aujourd’hui nous sommes à plus de 1400.
Est-ce la valeur de l’or qui a été multipliée par 40 ? Nous savons tous que non.
Le stablecoin VeraOne est issu d’un choix fort permettant de profiter en temps réel de la valeur pérenne de l’or et de sa stabilité légendaire face à tous les systèmes monétaires, y compris face aux cryptomonnaies volatiles.
Que ce soit pour quelques heures, quelques jours ou plusieurs mois, en utilisant le stablecoin VeraOne, on stoppe entre deux opérations la volatilité des cryptomonnaies voire de certaines devises au moyen d’un actif réputé pour sa stabilité (si on prend la valeur de l’or par rapport à une moyenne de monnaies fiat reconnues).
Dans certaines circonstances la volatilité est recherchée, dans d’autres il est important de la fuir.
L’or physique, en pleine propriété, c’est le choix idéal pour couvrir une position et se sécuriser des fluctuations de valeur trop importantes.
Quels sont vos objectifs pour le stablecoin VeraOne ?
Nous souhaitons d’ici 5 ans devenir l’alternative stablecoin non adossée à des monnaies fiat.
Y aura-t-il une carte de paiement afin de pouvoir dépenser ses jetons VeraOne comme le fait la carte Veracash pour de l’or ou des métaux précieux ?
Cette offre n’est pas dans nos plans aujourd’hui car nous allons justement créer des passerelles entre VeraOne et VeraCash de sorte que toute personne qui souhaite utiliser ses VeraOne dans la vie courante puisse le faire par un simple transfert de ses VRO vers son compte VeraCash.
Que pensez-vous de l’arrivée de la cryptomonnaie Libra qui sera lui aussi un stablecoin ?
Avec l’apparition de la Libra, lancée par Facebook, nous pouvons considérer qu’une révolution est en œuvre.
En effet, pour la première fois, plus d’un tiers de la population mondiale (plus de 2,3 milliards d’utilisateurs) est mobilisable autour d’une monnaie globale dès son lancement.
Une date historique dans l‘histoire des monnaies, qui résonne au même titre que les accords de Bretton Woods en juillet 1944, ou la décision des USA en août 1971 de déconnecter définitivement le dollar de l’or.
Un projet d’autant plus important qu’il implique Facebook et d’autres acteurs majeurs de la Tech, qui dépassent avec leur chiffre d’affaires le PIB de nombreux pays.
Si tout se passe comme ses créateurs l’ont prévu, l’usage en sera immédiat et mondial…
Perspectives et réflexions face à une situation inédite.
A notre avis, dans 10 ans, le Bitcoin existera toujours mais il sera probablement considéré comme ce dinosaure par lequel tout a été possible.
Il sera certainement détrôné par des cryptomonnaies plus efficaces en tant que monnaies d’échange privées.
Le projet Libra proposé par Facebook, qu’il réussisse ou non, est une première pierre majeure à cet édifice.
Et VeraOne en est une alternative, une forme d’antagoniste sain, pensé pour ceux qui, comme nous, redoutent l’usage abusif de leurs données personnelles ou bien craignent une défaillance du collatéral.
Quels conseils donneriez-vous à des entrepreneurs ou créateurs d’entreprise qui voudraient se lancer dans le secteur crypto et blockchain ?
Tout d’abord, vis à vis de leur activité ils doivent se demander si le fait de s’appuyer sur le secteur crypto/blockchain est une condition nécessaire pour lancer leur activité.
En effet, ils doivent savoir qu’ensuite, il sera compliqué pour eux d’ouvrir un compte bancaire, pouvoir créer une structure en France sans avoir monté un dossier digne de celui d’une introduction en Bourse, etc.
Bref, la France n’est pas le pays idéal pour lancer un projet à la fois ambitieux, innovant et sérieux.
La France est intéressante pour des projets déjà matures qui ont les moyens de répondre aux contraintes imposées.
Ensuite il faut savoir être agile.
Entre le début et la mise en production d’un projet, il est normal et même sain d’avoir évolué sur le plan de ses choix techniques voire même de modèle économique.
Celui qui n’aurait pas la souplesse verrait certainement son projet ne pas aboutir.
Eviter le plus possible de passer par des advisors mais au contraire constituer un pool interne des meilleurs spécialistes.
Ces spécialistes sont le sang de votre structure.
S’ils sont externes ou bien insuffisamment liés à votre projet, cela veut dire que c’est leur projet et non le votre.
Et puis par expérience, je peux dire que les connaissances autour de l’univers crypto/blockchain ont tendance à se périmer très très vite.
Alors les spécialistes autoproclamés d’un jour sont parfois en retard d’une guerre juste 6 mois plus tard.
Quelles sont les prochaines étapes concernant le stablecoin VeraOne ?
Le début de l’année 2020 va être consacré à sortir de la phase de Beta testing pour apporter la meilleure expérience utilisateur.
Ensuite, nous allons rentrer dans un travail long et fastidieux d’intégration de notre token sur les plateformes d’exchange majeures pour lui donner la visibilité nécessaire.
Vous pouvez continuer votre lecture en lisant notre article sur le lancement du stablecoin VeraOne.